Rwanda/Paul Kagame crache le feu et explose: "...Allez au diable !"

Paul Kagame / Président du Rwanda

À l’occasion de Kwibuka 31, la 31e commémoration du génocide des Tutsi au Rwanda, le président Paul Kagame a livré un discours aussi brutal que révélateur. Si ses mots ont galvanisé certains de ses partisans, ils ont aussi soulevé des critiques sur sa posture de plus en plus agressive, son isolement diplomatique et son refus persistant d’assumer une part de responsabilité dans l’instabilité de la région.

« Ce qui ne nous a pas tués et achevés il y a 31 ans nous a endurcis, préparés à affronter les épreuves qui viendront toujours. Nous ne mourrons pas sans nous battre, comme la dernière fois. »

En mobilisant cette mémoire tragique, Kagame renforce l’idée d’un Rwanda résilient, forgé dans la douleur.

Mais ce rappel n’est pas neutre. Il sert aussi à légitimer un discours nationaliste dur, où toute critique extérieure est perçue comme une menace, et toute opposition interne comme une trahison.

Une colère dirigée… vers la RDC et les “donneurs de leçons”

Le passage le plus commenté de son discours, c’est celui où il explose face aux sanctions et aux critiques internationales :

« Nous devons vivre notre vie, nous devons vivre comme nous l'entendons. Et je dis à quiconque en face : “Allez au diable !” Si quelqu'un vient vous dire que nous allons vous sanctionner, allez au diable. Allez au diable, tout simplement. Vous avez vos propres problèmes à régler. Allez régler vos propres problèmes. Laissez-moi m'occuper des miens. Voilà l'esprit que les Rwandais doivent avoir au quotidien. »

Dans le viseur du président : la République démocratique du Congo, ses soutiens internationaux et tous ceux qui accusent le Rwanda de nourrir des rébellions dans l’Est congolais, de piller les ressources minières et de jouer un rôle central dans la déstabilisation régionale.

Plutôt que de répondre sur le fond, Kagame attaque – frontalement, violemment, comme pour mieux éviter toute remise en question.

Un discours de résistance… ou de diversion ?

Si Paul Kagame veut apparaître comme le chef d’un peuple fort, résilient, prêt à tout pour sa souveraineté, nombreux sont ceux qui voient dans sa rhétorique une tentative de détourner l’attention des problèmes internes : la restriction croissante des libertés, l’opposition muselée, les voix critiques exilées ou réduites au silence.

Le président rwandais manie avec habileté la mémoire du génocide pour créer un récit d’unité nationale, mais aussi pour disqualifier toute critique extérieure comme étant “malveillante” ou “coloniale”.

Un Rwanda fort… ou verrouillé ?

Depuis plus de deux décennies, Kagame construit un État admiré pour sa discipline et son efficacité, mais craint pour son autoritarisme et sa fermeture.

À mesure que les tensions montent avec la RDC, le langage guerrier du président rwandais inquiète.

Il ne fait aucun doute que le Rwanda a le droit, et même le devoir, de se défendre.

Mais en refusant de reconnaître la complexité du conflit régional, Kagame choisit la provocation plutôt que la diplomatie.

Kwibuka 31 aurait pu être un moment de mémoire, de réconciliation, de lucidité.

Il s’est transformé en tribune de défi. Paul Kagame y a affirmé haut et fort qu’il ne plierait jamais face aux accusations.

Mais à trop brandir la colère, il risque surtout de renforcer l’isolement d’un pays qui a autant besoin de vérité que de justice.

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