Le général Abdourahamane Tiani, président de la transition au Niger, vient de frapper un grand coup. Dans un arrêté officiel daté du 9 avril 2025, il annonce la dissolution de trois syndicats jugés stratégiques et influents au sein des corps paramilitaires : le Syndicat national des agents des douanes (SNAD), le Syndicat national des cadres des eaux et forêts (SYNACEF) et le Syndicat national des travailleurs des eaux et forêts (SNATEF).
Une mesure choc, justifiée par la Charte de la refondation
Cette décision radicale s’appuie sur l’article 39 de la Charte de la refondation, promulguée le 26 mars dernier, qui interdit explicitement toute activité syndicale au sein des forces de défense et de sécurité.
La Charte, adoptée pour remplacer la Constitution suspendue après le coup d’État du 26 juillet 2023, fixe les nouvelles règles de gouvernance du pays en transition.
Le régime considère que les activités syndicales dans les rangs paramilitaires sont désormais incompatibles avec les impératifs de sécurité nationale.
Selon les autorités, cette mesure vise à préserver la cohésion et la discipline dans un contexte d’insécurité persistante.
Sécurité nationale : priorité absolue
Alors que le Niger est confronté à des attaques récurrentes de groupes terroristes affiliés à Al-Qaïda et à l'État islamique, la mobilisation totale des forces de sécurité est devenue une priorité stratégique.
Les douanes, les eaux et forêts, et autres services paramilitaires sont de plus en plus sollicités pour des missions de terrain et de contrôle.
Dans ce climat tendu, toute forme de division ou de revendication syndicale est perçue comme une menace potentielle à l’efficacité des forces.
En dissolvant ces syndicats, le général Tiani entend recentrer l’ensemble de l’appareil sécuritaire autour de l’ordre, de l’obéissance et du commandement unifié.
Vers une transition sous haute surveillance
Cette décision s’inscrit dans une logique de centralisation croissante du pouvoir.
Depuis son arrivée à la tête du pays, le général Tiani renforce progressivement le contrôle de l’État sur les secteurs sensibles, avec une gouvernance marquée par la rigueur militaire.
Avec une période de transition fixée à au moins cinq ans, les autorités actuelles tracent leur propre voie, loin des modèles classiques démocratiques, en privilégiant une stabilité sécuritaire avant toute ouverture politique.
Cette nouvelle phase marque une rupture définitive avec les pratiques syndicales dans les secteurs régaliens, et envoie un message clair : l’heure est à l’autorité, pas à la négociation.
Le ton est donné. Le Niger, sous la houlette du général Tiani, entre dans une phase de refondation profonde où l’État se veut fort, centralisé et inflexible.
Dérive autoritaire ou nécessité ?
Mais cette concentration du pouvoir soulève des inquiétudes grandissantes.
En supprimant des espaces de dialogue comme les syndicats, le régime militaire prend le risque de museler toute voix dissidente au sein même de l’appareil d’État.
Ce type de gouvernance, sous couvert de sécurité, flirte dangereusement avec une dérive autoritaire.
Beaucoup s'interrogent : s’agit-il réellement d’un effort pour renforcer l’efficacité des forces, ou d’une manœuvre pour étouffer toute contestation et verrouiller l’ensemble des institutions ?
À vouloir tout contrôler, le pouvoir en place pourrait bien créer un climat de méfiance, voire de frustration silencieuse, aux conséquences imprévisibles.
Commentaires