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Writer's pictureTowanou Johannes

Mali : les dessous de la fracture entre Choguel Maiga et Assimi Goïta

Choguel Maïga et Assimi Goïta, en janvier 2024

Longtemps perçu comme le fidèle soutien de la junte militaire malienne, Choguel Kokalla Maïga change aujourd’hui de registre.


Ce Premier ministre, jusque-là indissociable de la transition conduite par Assimi Goïta, semble amorcer une rupture brutale.


Dans un contexte où chaque décision de l’État est scrutée, ses récentes sorties publiques sonnent comme un avertissement adressé aux militaires au pouvoir.


Cette évolution de Choguel Maïga marque un tournant. Celui qui incarnait la voix civile d’un régime en quête de légitimité dévoile des fractures internes insoupçonnées.


Le soutien inconditionnel d’autrefois laisse place à une posture critique. En s’affranchissant ainsi de la ligne officielle, Maïga renforce les doutes sur la cohésion de l’équipe dirigeante et la viabilité de la transition.


Un fonctionnement opaque au sommet de l’État


La gouvernance de la junte malienne est désormais au cœur des critiques. Les décisions cruciales, telles que le report des élections ou les orientations stratégiques du pays, semblent prises sans consultation préalable.


Ce mode de gestion exclut non seulement les acteurs clés du gouvernement, mais fragilise également le socle même de la transition : la transparence et l’inclusion.


Choguel Maïga, habitué des arcanes du pouvoir, pourrait difficilement ignorer ces dysfonctionnements.


Mais son apparent ras-le-bol montre que l’opacité atteint des niveaux critiques.


En coulisses, ce désaveu traduit des tensions latentes entre civils et militaires, entre partenaires supposés d’un projet commun désormais miné par des intérêts divergents.


Une décoration qui ne trompe personne


La décoration reçue par Choguel Maïga des mains d’Assimi Goïta le samedi 16 novembre a tout l’air d’une ultime tentative de préserver les apparences.


Officiellement salué pour son rôle dans la transition, le Premier ministre semble paradoxalement plus isolé que jamais.


Ce geste, qui aurait dû symboliser l’unité, illustre au contraire l’embarras d’une junte confrontée à la défiance croissante de ses propres alliés.


Pour certains observateurs, cette distinction n’est qu’une façade destinée à masquer des désaccords profonds.


Choguel Maïga, pourtant au cœur de la machine étatique, se retrouve marginalisé dans les processus de décision.


Une situation qui, loin de le freiner, alimente une communication calculée pour marquer son indépendance.


Un repositionnement stratégique


Fin connaisseur des subtilités politiques, Choguel Maïga ne se contente pas de constater les dérives.


Sa prise de distance progressive ressemble à un repositionnement méticuleux.


En homme avisé, il sait que les alliances au sommet du pouvoir sont fragiles et que l’histoire ne sera pas tendre avec ceux qui auront échoué à tenir leurs promesses.


En rompant avec le silence complice, Maïga tente de sauvegarder son propre avenir politique.


Il devient le porte-voix d’un malaise largement ressenti, à la fois dans les cercles du pouvoir et parmi le peuple malien.


Ce choix, risqué mais potentiellement payant, pourrait lui permettre de se poser en alternative crédible si la transition venait à s’effondrer.


Un régime en sursis ?


Cette dissidence au sommet s’inscrit dans un contexte déjà fragile. Les militaires, confrontés à des défis colossaux, peinent à rassurer sur leur capacité à mener à bien la transition.


Les critiques ouvertes de Choguel Maïga ajoutent une dimension supplémentaire à la crise de légitimité qui guette le régime.


Si le Premier ministre cherche à sauter du navire avant son naufrage, il laisse derrière lui une junte affaiblie, tiraillée entre ses ambitions personnelles et ses engagements initiaux envers le peuple malien.


La question n’est plus de savoir si la transition est en danger, mais plutôt combien de temps elle pourra encore tenir face à ces vents contraires.


En se démarquant ainsi, Choguel Maïga ne fait pas qu’exposer les failles du régime.


Il rappelle, en creux, que la refondation de l’État malien ne peut se faire sans une gouvernance claire et inclusive.


Mais à mesure que la dissension grandit, c’est l’avenir même du Mali qui se joue dans ces luttes de pouvoir.

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