Depuis la destruction d’un drone malien à Tinzaouatène par la défense aérienne algérienne, dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025, le conflit larvé entre Bamako et Alger a pris une tournure explosive. Ce qui n’était au départ qu’un différend sécuritaire à la frontière s’est transformé en crise diplomatique ouverte, emportant dans son sillage l’ensemble des pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES).
Un drone malien considéré comme hostile par Alger
L’armée algérienne affirme avoir abattu un drone armé de reconnaissance malien après qu’il a franchi la frontière sur environ 2 kilomètres dans la région militaire de Tinzawaten.
Il s’agirait, selon le Ministère algérien des Affaires étrangères, de la troisième violation de l’espace aérien algérien par les forces maliennes en l’espace de quelques mois.
Cette dernière intrusion aurait été jugée comme une « manœuvre d’hostilité », justifiant son interception.
De son côté, l’État-major général des Armées maliennes nie catégoriquement toute incursion, affirmant que l’appareil (immatriculé TZ-98D), menait une mission de routine dans l’espace aérien malien, dans le cadre de la sécurisation du territoire.
L’AES riposte et accuse l’Algérie de soutenir le terrorisme
Le 6 avril, les Chefs d’État du Mali, du Burkina Faso et du Niger, regroupés au sein de l’AES, ont publié un communiqué commun.
Ils y dénoncent un acte d’agression manifeste et accusent l’Algérie d’être un « exportateur de terrorisme » dans la région sahélienne.
Selon eux, le drone n’a jamais quitté l’espace aérien malien et l’attaque constitue une violation de leur souveraineté.
Fermeture croisée des espaces aériens : une guerre des cieux s’installe
Le lendemain, le 7 avril, Alger annonce la fermeture immédiate de son espace aérien aux appareils maliens.
Le ministère malien des Transports réagit dans la foulée avec un communiqué officiel (N°02-MTI-2025), décrétant la fermeture de l’espace aérien malien à tous les aéronefs civils et militaires à destination ou en provenance d’Algérie.
Bamako invoque une mesure de réciprocité et dénonce le parrainage du terrorisme par le régime algérien.
L’Algérie frappe fort sur le plan diplomatique
Dans un nouvel épisode de cette escalade, l’Algérie a rappelé pour consultation ses ambassadeurs accrédités au Mali, au Burkina Faso et au Niger.
Le ministère algérien des Affaires étrangères exprime son profond regret face à l’alignement « aveugle » du Burkina et du Niger sur la position malienne, qu’il juge infondée.
Pour Alger, cette solidarité n’est qu’une tentative des juntes sahéliennes de détourner l’attention de leurs échecs politiques en désignant un bouc émissaire régional.
Des mots forts mais pas (encore) de confrontation militaire
Pour l’instant, l’affrontement reste confiné au terrain diplomatique et symbolique. Aucun affrontement militaire n’est rapporté.
Mais l’ambiance entre les deux blocs devient de plus en plus électrique, notamment dans un contexte régional où l’AES tente de construire une autonomie stratégique face aux puissances étrangères.
Pendant ce temps, Alger revendique son rôle de garant de la stabilité au nord du Sahel.
Un basculement dangereux pour l’équilibre régional
Cette crise pourrait durablement fragiliser les mécanismes de coopération transfrontalière dans une zone déjà minée par le terrorisme, la pauvreté et les rivalités géopolitiques.
Les appels à la désescalade se font rares, tandis que les accusations réciproques s’intensifient.
L’évolution de cette querelle pourrait avoir des répercussions durables sur l’équilibre politique et sécuritaire de tout le Sahel.
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