Dans une scène politique ivoirienne déjà complexe, l'ancien président Laurent Gbagbo a franchi une étape controversée en étant officiellement investi par son parti, le Parti des Peuples Africains-Côte d'Ivoire (PPA-CI), en tant que candidat à l'élection présidentielle de 2025. Cette décision audacieuse soulève des questions, alors même que Gbagbo demeure inéligible en raison de son exclusion des listes électorales.
Un acte défiant les conventions
Le 10 mai 2024, dans un geste qui a captivé l'attention nationale et internationale, Laurent Gbagbo a accepté l'investiture de son parti pour briguer la présidence en octobre 2025, malgré son incapacité actuelle à se présenter légalement en raison de son exclusion des élections.
Dans une déclaration prononcée lors d'une cérémonie au prestigieux hôtel Ivoire d'Abidjan, Gbagbo a non seulement accepté la nomination, mais il a également promis de ne faire qu'un seul mandat, appelant à une gouvernance résolue et inclusive.
Un héritage controversé
Laurent Gbagbo, une figure polarisante de la politique ivoirienne, a émergé sur la scène internationale en tant que président de la Côte d'Ivoire de 2000 à 2011.
Son mandat a été marqué par des tensions ethniques et politiques, culminant en une crise post-électorale sanglante en 2010-2011.
Cette dernière a fait des milliers de victimes et a laissé des cicatrices profondes dans le tissu social du pays.
Des écueils juridiques multiples
Bien que Gbagbo ait été acquitté de crimes contre l'humanité par la Cour pénale internationale, il a été condamné à 20 ans de prison en Côte d'Ivoire pour son rôle présumé dans la crise post-électorale.
La grâce à lui accordé en 2022 par l'actuel président Alassane Ouattara a suscité des controverses, car elle ne l'a pas rendu éligible pour les futures élections, laissant ainsi sa candidatureactuelle dans l'incertitude juridique.
Des promesses politiques et des défis à surmonter
Dans son discours d'investiture, Gbagbo a esquissé un programme politique ambitieux, promettant de lutter contre la corruption, de renforcer l'indépendance judiciaire, de stabiliser l'économie et d'améliorer les services de santé.
Cependant, ces promesses sont éclipsées par les questions persistantes sur sa légitimité à se présenter et sur sa capacité à unir un pays toujours divisé par des décennies de conflits et de tensions politiques.
Un pays en attente de réconciliation
La Côte d'Ivoire, déchirée par des décennies de luttes et de guerres civiles, demeure confrontée à la nécessité de réconciliation vraie et de justice.
Alors que Gbagbo appelle à l'unité et à la vérité sur les conflits passés, la route vers la réconciliation semble semée d'obstacles, avec des divisions persistantes et une quête insatisfaite pour la responsabilité des actes commis pendant les périodes de conflit.
Des adversaires politiques et une dynamique incertaine
En face de Gbagbo se dresse une myriade de défis politiques, notamment la possible candidature de l'actuel président Alassane Ouattara pour un quatrième mandat.
Aussi peut-on citer la montée en puissance de Tidjane Thiam, un banquier international, à la tête du Parti Démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI).
De plus, des anciens alliés de Gbagbo, tels que Charles Blé Goudé et Pascal Affi N'Guessan, pourraient également présenter leur candidature, ajoutant ainsi une complexité supplémentaire à un paysage politique déjà fragmenté.
Les enjeux d'une candidature de Laurent Gbagbo
La candidature de Laurent Gbagbo revêt une importance stratégique considérable, non seulement pour le pays aujourd'hui, mais aussi pour son avenir politique à long terme.
En effet, elle symbolise bien plus qu'une simple tentative d'accès au pouvoir. Elle incarne la résilience politique de son parti, le Parti des peuples africains-Côte d'Ivoire (PPA-CI), et la détermination de ses partisans à défendre leurs idéaux malgré les obstacles.
En s'accrochant à cette candidature, le PPA-CI renforce sa présence sur la scène politique ivoirienne, consolidant ainsi son influence et sa légitimité auprès de ses partisans et de l'électorat.
Cette démarche transcende la simple volonté de participer à une élection ; elle revêt un caractère symbolique, affirmant la place du PPA-CI dans le paysage politique ivoirien et rappelant l'importance du pluralisme politique dans une démocratie en construction.
Outre son symbolisme politique, la candidature de Gbagbo permet au PPA-CI d'occuper l'espace politique et d'affirmer son rôle d'acteur majeur dans le débat national.
Même si cette candidature est vouée à l'échec sur le plan juridique, elle offre au parti une tribune pour faire entendre sa voix, défendre ses idées et présenter son programme politique.
En participant activement au processus électoral, le PPA-CI dynamise le paysage politique ivoirien en offrant une alternative aux partis établis et en donnant une voix aux électeurs qui se sentent marginalisés ou ignorés par le système politique traditionnel.
Cette présence active sur la scène politique contribue à revitaliser la démocratie ivoirienne en encourageant la participation citoyenne et en renforçant le lien entre les gouvernants et les gouvernés.
En proposant la candidature de Gbagbo, le PPA-CI fait également un pas significatif vers les jeux d'alliance qui pourraient éventuellement décider de la présidentielle de 2025.
Dans la perspective d'un second tour, le PPA-CI peut avoir une carte à jouer en appelant à voter pour l'un des candidats qui propose un projet auquel il souscrit ou pour faire échec au candidat de la majorité.
En se positionnant comme un acteur politique majeur, le PPA-CI pourrait donc influencer les débats politiques et contribuer à façonner l'agenda politique du pays, même sans la participation directe de son leader.
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