C'est une initiative courageuse que devraient imiter d'autres nations du continent.
Le Sénégal entame une révolution éducative en mettant fin à la prédominance des langues étrangères dans son enseignement.
Dès octobre 2024, les élèves de douze des quatorze régions du pays commenceront à apprendre exclusivement dans les langues nationales.
Cette réforme audacieuse, portée par le ministre de l’Éducation, Moustapha Mamba Guirassy, place les langues locales telles que le wolof, le diola, le pular, le sérère, le malinké et le soninké au cœur du système éducatif.
L’objectif ? Renforcer l’identité culturelle et offrir un enseignement plus accessible.
Un retour aux sources linguistiques
Le débat autour de l'intégration des langues locales dans les écoles sénégalaises remonte aux années 1970.
Depuis des décennies, des acteurs influents du secteur éducatif, comme le syndicaliste El Hadji Malick Youm, militent pour l’abandon progressif du français, jugé inadapté à une grande partie de la population.
Cheikh Anta Diop, intellectuel de renom, avait déjà affirmé qu’une langue nationale était un vecteur plus puissant de développement qu'une langue étrangère. En réponse à cette vision, le Sénégal franchit désormais une étape décisive.
Apprendre dans sa langue maternelle
Depuis 2016, les autorités ont amorcé un processus d'introduction progressive des langues nationales dans les écoles.
Désormais, cette mesure couvre presque tout le territoire. À partir de cette année, les élèves de Casamance commenceront leurs cours en diola, tandis que d’autres régions utiliseront des langues propres à leurs populations.
Cette méthode n’est pas seulement une question d’instruction, mais de valorisation des langues en tant que matières d'étude à part entière.
Cheikh Beye, responsable du programme de diffusion des langues, précise que cette approche vise à enseigner non seulement dans ces langues, mais également leur grammaire et structure, enrichissant ainsi le cursus scolaire.
Des résultats concrets et prometteurs
Les premières expériences montrent que les enfants apprennent plus rapidement à lire et écrire lorsqu’ils sont formés dans leur langue maternelle.
Elhadji Ka, enseignant au Sénégal, témoigne des progrès significatifs réalisés par ses élèves grâce à cette approche.
Non seulement cela renforce leur apprentissage initial, mais cela leur permet aussi d’appréhender le français avec plus de facilité par la suite.
Malgré quelques défis, notamment le manque de manuels adaptés, les résultats encourageants confortent le gouvernement dans cette voie.
Vers une renaissance éducative et culturelle
Au-delà de l’enseignement, cette réforme est aussi une déclaration politique.
En rompant avec l’héritage colonial et en valorisant le patrimoine linguistique sénégalais, les autorités envoient un message fort : l’avenir du Sénégal passe par la préservation et la promotion de ses racines.
Cette transformation du système éducatif s’accompagne d’une refonte des manuels scolaires, intégrant des figures historiques locales et une nouvelle lecture de l’histoire nationale.
Alors que des efforts sont encore nécessaires pour codifier certaines langues et produire les ressources pédagogiques indispensables, cette réforme représente un pas majeur vers une éducation véritablement sénégalaise, enracinée dans la culture et les traditions du pays. Un symbole puissant de souveraineté culturelle qui résonne au-delà des salles de classe.
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